Quelques mots à l’intention de l’agent de santé villageois

Quelques mots à l’intention de l’agent de santé villageois

Qui est “agent de santé”, ou “soignant” dans le village ?

Le soignant ou l’agent de santé du village est une personne qui aide sa famille et ses voisins à vivre en meilleure santé. Elle est souvent choisie par les autres habitants du village parce qu’elle est particulièrement capable et bienveillante.

Certains agents de santé villageois reçoivent une formation et de l’aide de la part d’un groupe organisé, par exemple le ministère de la santé publique. D’autres n’ont pas de position officielle. Ce sont simplement des membres de la communauté, respectés par les autres pour leur savoir-faire dans le domaine de la santé. Souvent, ils se sont formés eux-mêmes en observant, en apportant leur aide, ou en étudiant tous seuls.

Au sens plus large du terme, toute personne qui contribue à améliorer la santé dans son village est un agent de santé villageois. Ceci veut dire que presque tous les membres de la communauté pourraient et devraient devenir des agents de santé :

Ce manuel a été conçu pour les agents de santé au sens large, c’est-à-dire, pour tous ceux qui veulent en savoir et en faire plus pour améliorer leur propre santé, celle de leur famille, et celle de leur communauté.

Une mère en deuil de son enfant mort. Un agent de santé se tient à ses côtés et la console.

Ayez du cœur.

La gentillesse aide souvent plus que la médecine.

N’hésitez jamais à montrer à quelqu’un que vous vous en souciez.

Si vous êtes agent de santé villageois, infirmier auxiliaire, ou même médecin, souvenez-vous que ce livre n’a pas été écrit pour vous seul. Il est destiné à tous. Partagez-le !

Utilisez ce livre pour expliquer ce que vous savez aux autres.

Vous pourriez peut-être organiser de petits groupes pour lire et discuter de ce livre, chapitre par chapitre.

Un agent de santé communautaire assis avec une famille du village et discutant avec eux.

L’agent de santé du village vit et travaille au même niveau que les gens de sa communauté. Sa première mission est de partager son savoir.

Cher agent de santé villageois,

Ce livre examine surtout les besoins de santé des gens. Mais pour aider les gens à améliorer la santé dans leur village, vous devez aussi connaître leurs besoins humains. Votre compréhension et votre souci de les aider sont aussi importants que votre connaissance de la médecine et de l’hygiène.

Voici quelques suggestions qui peuvent vous aider à les soutenir aussi bien sur le plan humain que sur le plan de la santé :

1. Soyez bienveillant.

Un mot amical, un sourire, votre main posée sur une épaule, ou tout autre signe d’amitié peut avoir plus d’importance que toute autre action de votre part. Traitez les autres comme des égaux.

Même quand vous êtes pressé ou préoccupé, essayez de vous souvenir des sentiments et des besoins des autres. Il est souvent utile de se poser la question : “ Que ferais-je s’il s’agissait d’un membre de ma propre famille ? ” La bonté aide souvent plus que les médicaments.

Traitez les malades comme des personnes, et non comme des cas. Soyez particulièrement bon avec les personnes gravement malades ou mourantes. Soyez aussi compréhensif envers leurs familles. Montrez-leur que vous compatissez.

2. Partagez votre savoir.

Comme agent de santé, votre première mission est d’enseigner. D’abord, en expliquant clairement aux gens comment ils peuvent éviter de tomber malades, puis en leur apprenant à reconnaître et à soigner les maladies – grâce, entre autres, à une utilisation raisonnable des remèdes traditionnels et des médicaments modernes. Rien de ce que vous avez appris ne peut poser de danger pour quiconque, à condition que vous leur ayez fourni des explications claires et complètes.
Certains docteurs prétendent que se soigner soi-même est dangereux. C’est peut-être parce qu’ils préfèrent que les gens dépendent de leurs services, qui sont coûteux. Mais en réalité, la plupart des problèmes de santé courants peuvent être soignés plus tôt et mieux par les gens eux-mêmes, à la maison.

Un agent de santé communautaire qui enseigne la nutrition aux hommes et aux femmes. Il montre du doigt un tableau avec des dessins d’aliments sains : fruits, légumes et poissons.

Trouvez des moyens de partager votre savoir.

3. Respectez les idées et les traditions de votre communauté.

Le fait d’avoir étudié certains aspects de la médecine moderne ne devrait pas empêcher qu’on apprécie la valeur des coutumes de la communauté et de ses moyens de guérison. Le côté humain se perd trop souvent quand la science médicale s’installe. Et c’est bien dommage, car…

La combinaison de ce qu’il y a de mieux dans la médecine moderne et dans la médecine traditionnelle peut être plus efficace que l’adoption séparée de l’une des deux approches.

Vous aidez ainsi à enrichir la culture de votre communauté, au lieu de l’appauvrir. Bien sûr, si vous vous rendez compte que certaines des coutumes locales sont dangereuses (par exemple, l’habitude de mettre de la terre sur le cordon ombilical fraîchement coupé d’un nouveau-né), vous voudrez certainement les faire changer. Mais agissez avec précaution, en respectant ceux qui croient en ces méthodes. Ne vous contentez jamais de dire aux gens qu’ils ont tort. Aidez-les à comprendre POURQUOI il faudrait faire les choses autrement.

Travaillez avec les guérisseurs traditionnels et les sages-femmes, et non contre eux.

Un agent de santé et un guérisseur traditionnel sont assis l’un à côté de l’autre en bavardant. L’agent de santé montre les médicaments modernes dans sa trousse, et le guérisseur montre les herbes utilisées pour la guérison.

Utilisez ce qu’ils ont à vous apporter, et encouragez-les à tirer avantage de ce que vous leur apportez.

Les gens sont lents à changer leurs attitudes et leurs traditions, et cela se comprend. Ils restent fidèles à ce en quoi ils croient, et cela doit être respecté.

La médecine moderne n’offre pas non plus de solutions à tous les problèmes. Elle en a résolu quelques-uns, mais en a créé d’autres, parfois plus sérieux. Les gens se mettent très vite à trop dépendre de la médecine moderne et de ses experts, à prendre trop de médicaments, et à oublier comment se soigner ou soigner les autres.

Il faut donc aller lentement – en gardant toujours un profond respect des gens, de leurs traditions, et de leur dignité humaine. Aidez-les à développer les connaissances et les capacités qu’ils ont déjà.

4. Connaissez vos limites.

Que vous ayez beaucoup de connaissances et de capacités ou très peu, vous pourrez faire un excellent travail, à condition que vous soyez conscient de vos limites et que vous ne les dépassiez pas. Faites ce que vous savez faire.

N’essayez pas de faire des choses que vous n’avez pas apprises ou pour lesquelles vous n’avez pas l’expérience nécessaire, si cela risque de causer un dommage à la personne ou la mettre en danger.

Mais jugez de la situation avec bon sens. La décision d’intervenir vous-même ou non dépendra souvent de la distance à parcourir pour trouver l’assistance appropriée.

Par exemple, une mère vient d’accoucher et elle saigne plus que vous ne le jugez normal. Si vous vous trouvez à moins d’une demi-heure d’un centre médical, il serait prudent de l’y amener d’urgence. Mais si la distance est plus grande et qu’elle perd beaucoup de sang, vous pourriez décider de lui masser l’utérus ou de lui injecter un médicament qui arrête les saignements, même si vous n’avez jamais appris à le faire. Trouvez des conseils pour contrôler les saignements abondants lors de l’accouchement à page Hémorragie (Saignements abondants).

Deux femmes discutent, dont l’une tient son bébé malade. L’autre dit avec un regard bienvielliant : “Je sais que le centre de santé est loin, mais ici on ne peut pas lui donner le traitement dont il a besoin. Je viens avec vous.”

Connaissez vos limites.

Ne prenez pas de risques inutiles. Mais dans les cas où il est évident que la personne court un plus grand danger si vous ne faites rien, n’ayez pas peur d’essayer un moyen qui pourrait produire un résultat positif.

Connaissez vos limites – mais servez-vous aussi de votre tête. Faites toujours de votre mieux pour protéger le malade, avant vous-même.

5. Continuez à apprendre.

Profitez de toutes les occasions pour en apprendre plus.

Étudiez tous les livres et toutes les informations que vous pourrez trouver, qui vous aideront à vous améliorer en tant que travailleur, en tant qu’éducateur, ou en tant que personne.

Un homme est assis à une table et lit un livre, entouré de livres, de papiers et de crayons.

Continuez à apprendre. N’acceptez jamais que quelqu’un vous dise qu’il y a des choses que vous ne devez pas savoir.

Soyez toujours prêt à poser des questions aux médecins, aux employés de la santé publique, aux experts en agriculture ou à quiconque peut vous apprendre quelque chose d’utile.

Ne manquez jamais une occasion de suivre une nouvelle formation.

Votre principal devoir est d’enseigner, mais si vous n’étudiez pas continuellement, le moment viendra où vous n’aurez plus rien de nouveau à apprendre aux autres.

6. Appliquez ce que vous enseignez.

En général, les gens font plus attention à ce que vous faites qu’à ce que vous dites. En tant qu’agent de santé, essayez de faire attention à vos habitudes et à la façon dont vous menez votre vie. Soyez un bon exemple pour vos voisins.

Avant de demander aux gens de construire des latrines, il faudrait que vous et votre famille en ayez déjà.

Un homme (qui fume une cigarette !) gronde un jeune homme parce qu’il fume.

Appliquez vous-même ce que vous enseignez aux autres (Sinon qui vous écoutera ?)

De la même façon, si vous organisez un travail en commun, soyez certain de travailler et de transpirer autant que tous les autres.

Un bon chef ne donne pas des ordres, il donne l’exemple.

7. Travaillez pour le plaisir que vous pouvez en tirer

Si vous voulez que les gens prennent part à l’effort d’améliorer leur santé et les conditions de vie dans le village, il faut que l’on puisse voir que vous y trouvez du plaisir vous-même. Sinon, qui voudrait suivre votre exemple ?

Essayez de rendre amusante la participation aux projets de travail communautaire. Entourer le point d’eau du village d’une clôture pour empêcher les animaux d’y boire peut être un travail très dur. Mais si tout le village apporte son aide dans une sorte de “ festival du travail ”, par exemple avec des rafraîchissements et de la musique, le travail sera plus vite fait et les gens auront pris un certain plaisir. Même les enfants peuvent participer à une tâche difficile, pourvu qu’ils puissent en faire un jeu.

Peut-être êtes-vous payé pour le travail que vous faites, peut-être ne l’êtes-vous pas. Mais ne refusez jamais de vous occuper de quelqu’un, et ne vous en occupez pas moins bien, parce que cette personne n’a pas les moyens de payer vos services.

Vous gagnerez ainsi l’affection et le respect des gens de votre communauté, ce qui vaut beaucoup plus que de l’argent.

8. Prévoyez et aidez les autres à prévoir

L’agent de santé responsable n’attend pas que les gens deviennent malades. Il essaye d’arrêter la maladie avant qu’elle ne commence, et encourage les gens à agir dès à présent pour protéger leur santé et leur bien-être dans l’avenir.

Beaucoup de maladies peuvent être évitées. Votre travail sera donc d’aider les gens de votre communauté à comprendre les causes de leurs problèmes de santé et à réagir en conséquence.

La plupart des maladies ont plusieurs causes, qui sont liées entre elles. Pour résoudre un problème de façon durable, il faut chercher les causes de base, et y répondre. Recherchez la racine du mal.

Dans beaucoup de villages, par exemple, la cause la plus courante de mort chez les petits enfants est la diarrhée. La diarrhée est causée en partie par le manque de propreté (manque d’installations sanitaires et d’hygiène). Vous pouvez améliorer la situation en creusant des latrines et en enseignant les premiers principes de l’hygiène.

Mais les enfants qui souffrent le plus et meurent le plus souvent de la diarrhée sont ceux qui sont malnutris. Leur corps n’a pas assez de force pour combattre l’infection. Pour prévenir les morts causées par la diarrhée, il faut donc aussi prévenir la malnutrition.

Et pourquoi tant d’enfants sont-ils malnutris ?

Vous découvrirez peut-être que plusieurs de ces causes, sinon toutes, expliquent la mort des très jeunes enfants dans votre région.

Un agent de santé est assis par terre et discute avec trois anciens du village.

Aidez les autres à prévoir

Et vous trouverez sans doute d’autres causes vous-même. Comme agent de santé, votre travail est aussi d’aider les gens à réfléchir, à comprendre et à réagir face au plus grand nombre de causes possible.

Mais souvenez-vous : pour lutter contre les morts d’enfants causées par la diarrhée, il faut beaucoup plus que des latrines, de l’eau potable, et de la “boisson spéciale” (les solutions de réhydratation). Vous découvrirez peut-être que l’espacement des naissances, l’amélioration des méthodes d’agriculture et un partage plus juste de la richesse, des terres et du pouvoir sont plus importants encore, sur une longue période.

Derrière la plupart des maladies et des souffrances humaines, on retrouve toujours le manque de prévoyance et la soif d’argent. Si vous vous souciez surtout du bien-être des gens qui vous entourent, aidez-les à apprendre à partager, à coopérer et à prévoir l’avenir.

Un enfant maigre et malnourri

Chaîne des causes de mort causée par diarrhée

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