Quelques mots à l’intention de l’agent de santé villageois
Une des parties les plus difficiles et les plus importantes des soins préventifs est d’amener les gens à utiliser les médicaments de façon raisonnable. Quelques médicaments modernes sont très importants et peuvent sauver des vies. Mais pour soigner la plupart des maladies, les médicaments ne sont pas nécessaires. Généralement, le corps lui-même peut lutter contre la maladie grâce au repos, à une bonne alimentation, et peut-être à quelques remèdes maison.
Il se peut que les gens viennent vous demander des médicaments alors qu’ils n’en ont pas besoin. Vous pouvez être tenté de leur en donner uniquement pour les satisfaire. Mais si vous le faites, une fois qu’ils se seront remis, ils penseront que c’est vous et le médicament qui les avez guéris. En réalité, c’est leur corps qui se sera guéri lui-même.
Au lieu d’apprendre aux gens à dépendre de médicaments dont ils n’ont pas besoin, prenez le temps de leur expliquer pourquoi ils ne doivent pas les utiliser. Dites-leur aussi ce qu’ils peuvent faire eux-mêmes pour se remettre.
De cette façon, vous aidez les gens à compter sur une ressource locale (eux-mêmes), plutôt que sur une ressource extérieure (le médicament). Vous protégez aussi leur santé, car il n’y a aucun médicament qui ne présente pas de risque.
Rappelez-vous que les médicaments peuvent tuer !
Les trois problèmes de santé courants pour lesquels les gens demandent trop souvent des médicaments dont ils n’ont pas besoin sont : (1) le rhume, (2) la toux modérée, et (3) la diarrhée.
Pour le rhume courant, le meilleur traitement est de se reposer, de boire beaucoup de liquides, éventuellement de prendre de l’aspirine. La pénicilline, la tétracycline et les autres antibiotiques n’ont aucune efficacité (voir Rhume et grippe).
Pour la toux modérée ou même pour une toux sévère avec mucus épais, de boire beaucoup d’eau diluera le mucus et facilitera le crachement, mieux et plus rapidement qu’un sirop pour la toux. Aspirer de la vapeur d’eau chaude peut apporter un grand soulagement (voir Toux). Ne rendez pas les gens dépendants du sirop pour la toux ou d’autres médicaments dont ils n’ont pas besoin.
Dans la plupart des cas de diarrhées infantiles, la prise de médicaments n’améliore pas l’état de l’enfant. Beaucoup de ceux qui sont couramment utilisés peuvent même être nuisibles (néomycine, streptomycine, Entéro-Vioform, chloramphénicol). Le plus important est que l’enfant boive beaucoup de liquides et mange assez de nourriture (voir Traitement de la diarrhée). La ressource-clé pour la guérison de l’enfant est la mère, et non le médicament. Si vous pouvez aider les mères à comprendre cela et à apprendre ce qu’elles doivent faire, beaucoup de vies d’enfants seront sauvées.
Les médicaments sont souvent utilisés de façon abusive, aussi bien par les médecins, que par les personnes qui croient en avoir besoin. Cette situation est regrettable pour de nombreuses raisons :
Un exemple de médicament perdant son efficacité est le chloramphénicol. L’utilisation trop fréquente de cet important mais dangereux antibiotique pour des infections ordinaires a eu pour conséquence, dans certaines parties du monde, qu’il n’agit plus contre la fièvre typhoïde, une infection très dangereuse. L’abus fréquent de chloramphénicol a rendu la typhoïde résistante à ce médicament.
Pour toutes les raisons expliquées ci-dessus, l’usage des médicaments devrait être limité.
Mais comment le limiter ? Ni les règlements et les restrictions sévères, ni le fait de ne permettre qu’à des personnes extrêmement qualifiées de décider de l’usage de médicaments n’ont empêché que ceux-ci soient trop utilisés. Ce n’est que quand les gens eux-mêmes seront mieux informés que l’utilisation prudente et limitée des médicaments se généralisera.
L’une des importantes missions de ceux qui travaillent pour la santé est d’amener les gens à comprendre qu’il faut utiliser les médicaments avec beaucoup de prudence.
Ceci est surtout vrai dans les régions où les médicaments modernes sont déjà très utilisés.
Pour plus de renseignements sur la bonne et la mauvaise utilisation des médicaments, voir Chapitre 6 ; sur la bonne et la mauvaise utilisation des piqûres, voir Chapitre 9 ; sur l’utilisation prudente des remèdes maison, voir Chapitre 1.